Marathon du Montcalm 2006
Challenge des 3000m ariégeois - Marathon du Montcalm 2006
Après le Trail des Citadelles au printemps dernier, voilà arrivé mon second objectif de l'année : une longue course de montagne : 42,5 km et 2600 D+/D-
Samedi matin vers 6h15 j'arrive à Auzat et tombe directement sur Fred et Kiki, 2 trailers audois rencontrés sur l'excellent site Freetrack11 avec qui j'ai déjà réalisé de belles sorties. Fred et Kiki ont une solide, pour ne pas dire énorme, expérience de l'Ultra Trail et des courses à étapes. Pour s'en convaincre, allez faire un petit tour sur le site de Kiki, vous pourrez y rêver à loisir de Desert Cup, UTMB, Marathon des Sables,... Et ne loupez surtout pas le fabuleux reportage qu'il a effectué l'hiver dernier sur l'Annapurna Mandala Trail. Prévoyiez la soirée, c'est époustouflant.
Fred et Kiki me présentent Daniel, dada11. Une nouvelle rencontre virtuelle qui se concrétise sur le terrain, c'est-y pas beau les nouvelles technologies.
Kiki qui ne fait pas la course, part en voiture pour préparer son reportage photo sur les pentes du Montcalm.
Remise du dossard, derniers préparatifs et discussions dans le gymnase car il ne fait pas très chaud dehors, et c'est rapidement l’heure de se rendre au départ.
Je retrouve Denis et Jean-Phi du club de saverdun courir sympa avec qui j'ai couru la Biroussanne et une sortie rando-course sur le Pique rouge de Bassiès, à partir de cette même vallée du Vicdessos.
Face à nous, encore dans les nuages, sa majesté Montcalm nous nargue. Bouh, mais qu'il est haut et qu'il est loin!!! Regardons nos pieds ou ceux des voisins, on se fera moins peur.
3,2,1 Feu. Nous voila en mouvement. Jean-Phi part comme une balle avec le groupe de tête, Denis est également sur un rythme trop rapide pour moi. Je le laisse donc partir. Je ne vois pas Fred et Daniel. Ils doivent être derrière moi.
Quelques kilomètres de route étalent le peloton avant que l'on ne bifurque à droite pour traverser le ruisseau de Bassiès et prendre un petit chemin étroit et pierreux, point de départ d'une première côte bien raide d'environ 400 D+ : la mise en bouche. Bâtons en mains, je décide de garder un rythme soutenu pour tester les sensations du jour. Les jambes répondent bien, le palpitant ne crie pas misère. C'est bon signe. Environ 1000m/h, un très bon rythme d'ascension pour moi, même certainement trop rapide pour la suite. Je reprends Denis et me retrouve assez rapidement à la bifurcation avec le sentier du Canal Carré.
Nous continuons donc sur cet ouvrage hydroélectrique désaffecté peu banal. La nature a souvent repris le dessus sur les dalles de bétons, et c'est finalement assez agréable de courir ici. Un parcours athlé nature avec une section balisée tous les cents mètres pour fractionner y a même été tracée par la FFA. Un nouveau concept de sentier aménagé en nature. M'ouais pourquoi pas !!??
Je me refais doubler plusieurs fois sur cette portion plate d'environ 4 km, où par nature je suis moins à l'aise et où j'ai décidé de baisser le rythme que je sais ne pouvoir tenir jusqu'au bout. Arrivé à l'Artigue après 1h12, c'est Daniel qui me rejoint et qui part devant lorsque je m'arrête au ravitaillement avant d'attaquer la partie de plaisir, les 1900D+ d'une traite pour atteindre le Montcalm.
Nous zigzaguons d'abord en forêt entre pierres et racines puis sur un terrain de plus en plus rocailleux. Je suis encore bien et je continue de monter à un rythme correct. Derrière moi, je vois que Denis n'est plus très loin, un ou deux lacets en retrait. Les ravitos sont nombreux, une vingtaine sur tout le parcours, et 3 à 4 fois plus de bénévoles qui les tiennent. Ca fait de nombreux encouragements, en plus de ceux des randonneurs sur le parcours.
J'ai ma bosse de chameau dans le dos. Je m'arrête donc rarement. Seulement je commence à avoir un coup de moins bien à partir du plat de Nouzère. Un verre d'eau plate me permet donc de faire passer le gel que je viens d'avaler. Denis m'a rejoint. Je me place dans sa roue et en avant. C’est dur mais je m'accroche jusqu'au refuge du Pinet (2240m , 2h28 de course).
Le vent souffle par moment assez fort. Il est surtout bien froid. Je m'arrête au ravitaillement du Pinet pour mettre manches longues et gants, et laisser ainsi partir Denis.
La suite de la montée est un peu plus laborieuse pour moi. Je ralentis et me fais doubler. Rien d'inquiétant toutefois ; même si je suis plus lent, je continue d'aller de l’avant et j’en profite pour apprécier le somptueux paysage qui nous entoure.
Passé l’étang du Montcalm où subsistent quelques coins de végétation, nous sommes maintenant dans un univers totalement minéral. Des pierres, des pierres, des pierres, partout des pierres, grises, jaunes, souvent orange ou rouille. Mais cet espace n'a rien de froid ni d'austère. Les sommets, qui nous attendent sont de véritables tas de cailloux, certes mais des tas de cailloux agencés par une main d’esthète.
Nous attaquons la partie un peu plus technique, où les mains sont parfois utiles. “Attention!” Ce sont les premiers qui redescendent déjà. Bondissant de pierres en pierres, ces drôles d’isards numérotés ne se ménagent pas. Encouragements !!! Je ne leur en veux pas de ne pas me répondre, leur attention est toute entière tournée vers la descente, choix de l’itinéraire, pose du pied, mouvement du buste et des bras. Pas question de se déconcentrer.
Parmi les Florent Ferrand, les Claude Escots que je reconnais pour les avoir déjà vu sur les podiums, parmi les Gil Besseyre, sans doute passé trop vite pour que je l’identifie, je vois passer deux jeunots d’à peine 20 ans : le vendéen Julien Cougnaud et l’andorran Lluis San Vicente qui finiront respectivement 1er et 5ème. Impressionnants !!!
Bon c’est bien joli de regarder les champions, ça fait de l’animation, mais c’est pas l’tout on a cette double ascension à finir…
... Un peu plus haut vers le col 2900m, Kiki, APN en main, s’impatiente ! Ses encouragements me seront bénéfiques. Je reprends un peu de poil de la bête dans le final du Montcalm. Sans doute le fait d’avoir le sommet en visu n’y est pas pour rien. Encouragements mutuels quand je croise Jean-Phi, Daniel et Denis redescendre du sommet. Ce dernier semblant caler un peu.
Je fais le tour du cairn sommital (3077m ; 3h55) et repars directement en sens inverse pour une descente prudente jusqu’au col 2980. Je croise alors Fred qui n’est plus très loin derrière moi.
La pente se redresse sur la crête finale de l’Estats où j’utilise à nouveau mes mains. Il est temps que cette phase d’ascension se termine car je suis de plus en plus lent. D’ailleurs je ne suis pas le seul. La plupart de ceux qui m’entourent a également bien ralenti le pas. Cherchant à ne pas finir exténué, je gravis tranquillement les derniers mètres du Pic d’Estats (3143m, 4h17). Arrivé au sommet, je fais une courte pause, histoire de préparer la descente qui s’annonce : calmer le palpitant, s’alimenter, ranger les bâtons dans le sac, profiter de cet instant unique et un peu irréel.
En regardant le chrono, je me dis que les premiers ne doivent plus être loin du final. Les bénévoles qui ont les infos par Talkie Walkie me confirment qu’ils n’ont pas encore passé la ligne d’arrivée. Chouette! J’ai encore toutes mes chances Laughing Wink
Je me lance donc dans la descente. D’abord assez prudemment pour que le message arrive bien à l’ensemble de la carcasse : Bon le haut du corps on se relâche, mais on reste vigilant, bras en balancier pour parer à tout déséquilibre. Les chevilles, pas de raideurs, on garde une certaine souplesse mais surtout de la tonicité. Faudrait pas qu’on se retrouve à finir sur la malléole. Les quadris. Ah les quadris !!! Bon vous avez déjà bien bossé mais faut en remettre un coup pour amortir. Allez les gars du tonus. On s’en remet tous à vous. Et pas de surprise, hein ! Sinon c’est vos potes, les genoux, qui vont morfler. Les mollets, z’avez bien fait vot’ boulot, en perm. On décompresse, et on récupère. Mais je ne veux rien entendre, pas de grincement, pas de couinement. Et on ne s’endort pas non plus, n’oubliez pas qu’on aura besoin de vous pour le dernier tiers-temps. Les ischios, pareil. On vous demande juste de balancer un peu la patte vers l’avant.
Test de mise en jambe concluant. Au col 2900 j’ai déjà repris quelques concurrents dont Jean-Phi qui a eu un gros coup de moins bien dans la montée. Pas de douleurs, pas de tentatives de crampes, les jambes se lèvent bien, l’esprit est clair et le moral au mieux, je peux donc pousser un peu le bouton de l’ampli …
Je me régale vraiment de cette délicieuse dégringolade. Je saute, je bondis, je vole au dessus des rochers tout en maîtrisant trajectoire et vitesse : accélération, freinage évitement pour passer un descendant ou laisser la place à un montant. C’est totalement grisant …
…Houlala ! Mais que fait cette jolie demoiselle dont je suis la foulée pourtant très aérienne et qui s’arrête soudain net devant moi sur cette dalle rocheuse inclinée. Je maîtrise, je maîtrise, je ne maîtrise rien du tout oui ! Impossible de dévier de trajectoire, impossible de m’arrêter. Bon, eh bien plus qu’une chose à faire : « Vous dansez mademoiselle ? » Je n’attends pas son assentiment et la prends d’office par la taille pour 3 ou 4 pas de valse avant de la reposer quelques mètres en contrebas. Ouf, on s’en sort bien, on évite le rock acrobatique. Vraiment désolé damoiselle. Je suis un parfait imbécile. Vous auriez pu vous faire très mal par ma faute.
Je m’enquiers de sa santé, et lui adresse mes plus plates excuses. A la noirceur de son regard, je comprends vite que le compagnon de madame n’a pas du tout apprécié ma technique d’approche « à la hussarde », il est vrai quelque peu osée. Ok, ok, je lâche l’affaire et repars donc seul sur ma route …
Le rythme reste soutenu, mais je redouble désormais d’attention lors des dépassements. Un incident est déjà largement suffisant.
Un peu plus loin je double Denis qui ne semble pas en grande forme. Malgré son malaise, il a quand même la présence d’esprit de m’indiquer un passage dangereux où il s’est fait une grosse frayeur lors d’une de ses reconnaissances du parcours. Je l’encourage à essayer de relancer la machine mais je me rends vite compte qu’il est totalement éteint. Plus de carburant !
Peu avant de rejoindre la forêt j’aperçois un coureur Tshirt blanc et moustaches. Pas de doute, c’est Daniel. Petit coup de boost pour le rejoindre et je l’invite à se caler dans ma foulée. Il me fait le coup de l’ancien (d’à peine 5 ou 10 ans mon aîné) :
- « Oh là ! Vas-y jeunot. Tu verras quand t’auras mon âge, tu te ménageras aussi dans les descentes »
- « Ok, alors je prends un peu d’avance. De toutes façons tu vas me reprendre sur le plat. »
Et voilà. J’enquille, dans une forme relativement bonne, les derniers kilomètres de cette somptueuse descente. Pas de douleurs ni de fatigue excessives. J’en suis tout surpris. D’autant plus que je ne me suis pas ménagé : 1900 D- en 1h10 Cool . Je sais pourtant que je ne suis pas au bout de mes peines. Cette partie finale qui s’annonce me fait peur depuis le départ.
Je m’offre une petite pause boisson au ravito du Parking du Montcalm avant de repartir sur le goudron que je redoute tant. En effet, les jambes sont quand même très lourdes maintenant. La foulée est pesante. Il reste un peu plus de 10km à parcourir et un peu moins de 50’ pour passer sous les 6h30. Je me remotive en me prenant à penser que c’est jouable.
Côte à côte avec une féminine, nous essayons d’unir nos efforts. En fait j’essaye surtout de m’accrocher à son rythme Laughing J’aimerais prendre des relais de temps en temps, mais je suis un peu juste maintenant. En tous cas son aide m’est très précieuse pour tenir sur ce bitume qui me parait déjà interminable. La distance restant à parcourir est maintenant balisée tous les kilomètres. Certes, cela permet de vérifier la cadence ; environ 5’ au kilo pour nous, toujours dans le rythme pour approcher les 6h30 Cool ; mais pour moi ça a plutôt l’effet de me démoraliser. Toujours dans l’attente de la prochaine borne qui semble toujours plus éloignée que la précédente. Rhaaa ! J’ai vraiment du mal avec la route.
Pour mon bonheur, nous la quittons pour reprendre un chemin pierreux en contrebas. Si je jubile, ma compagne par contre s’indigne. Elle va lever le pied et malheureusement décrocher rapidement.
Si le parcours est maintenant plus à mon goût, le rythme a bien baissé. D’autant plus que contrairement à ce que m’annoncent certains, il reste encore plusieurs bosses bien cassantes qui ne s’avalent pas à la légère. Ca tire, ça tire ! Mais ça tient.
Et ça tient aussi grâce au public toujours très généreux dans ses encouragements et ses applaudissements. Merci à tous. Vous ne pouvez savoir combien ceux-ci et les sourires que vous nous lancez nous sont une précieuse aide.
Ca commence à sentir l’écurie et ça revient derrière. Une locomotive lancée à belle allure me laisse sur place. C’est Daniel qui comme je l’avais prévu a bien gérer l’effort. Beau finish ! Je n’arrive pas à prendre le bon wagon. Pour le chrono c’est râpé. Vraiment pas grave. De toutes manières je suis très heureux de finir en bonne forme et largement sous les 7 heures que je visais au départ.
Dernière ligne droite pour retrouver Auzat. Un anglais, jolie dégaine : débardeur vert, short écossais des années 70, chaussures presque de ville de la même époque - mais comment fait-il pour courir avec ça ? - me rejoint avec un petit groupe. Cette fois-ci j’arrive à me faire violence pour rester au contact. Soudain, l’anglais stoppe net, victime de crampes. Désolé, je n’ai pas le courage de m’arrêter pour l’aider à s’étirer. Il va repartir bientôt pour finir à quelques encablures, 1er V2.
Reste donc la traversée du village, où l’ovation du public nous porte plus que jamais et où toutes les douleurs s’effacent derrière l’exaltation d’en finir. J’aperçois mes enfants et leur maman, tous surpris de me voir arriver si tôt. Je n’aurai pas l’immense joie de passer la ligne d’arrivée avec eux comme aux Citadelles, mais je profiterai de leur présence ensuite. Ils pourront même faire un peu d’escalade sur un mur tenu par la FFME, parmi les stands présents sur place. Dans l’après-midi, mon minot aurait même eu droit à sa course, si j’avais su plus tôt qu’elle était ouverte aux tous-petits à partir de 4 ans. Ca sera pour l’année prochaine !!!
Temps final 6h38, très content Very Happy, à quelques places de Daniel 6h36. Jean-Phi qui s’est refait sur la fin arrivera en un peu moins de 7 heures, puis ce sera au tour de Fred qui s’est ménagé dans la descente pour ne pas compromettre sa préparation à la Diagonale des Fous, et enfin Denis pourtant parti sur de bonnes bases finira très affaibli et complètement dépité de ne pouvoir boucler cette course dans un chrono digne de son niveau. C’est vraiment dommage, Denis. Tu t’étais pourtant très bien préparé pour cela. Peut-être un problème d’alimentation à explorer. Allez, ce n’est que parti remise !!!
Bilan : Au plan physique, aucun bobo si ce n’est la petite ampoule rituelle. Au plan matos, une semelle de Trabuco à moitié arrachée. Je ne m’en suis rendu compte qu’une fois enlevée. Une bonne couche de Pattex remettra le tout en place.
Au niveau de la course : Je m’étais fait une haute idée du Marathon du Montcalm. Et je n’ai absolument pas été déçu. C’est une course exigeante mais franchement superbe. Une organisation sans faille, et une ambiance montagnarde chaleureuse. J’y retournerai avec beaucoup de plaisir.
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